Une vie d’infertile

Je vous fait part ici d’un texte que j’ai écrit pour la web-expo de la semaine de sensibilisation sur l’infertilité. J’ai décidé de raconter en quelques phrases ma vie d’infertile. J’y ai aussi envoyé un petit poème que j’avais écrit il y a bientôt 3 ans

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Les années sont passées sans que l’on ne s’en rende complètement compte – bien sûr qu’on les ‘comptait’, en voyant les enfants des autres naître et grandir, les uns après les autres… bien sûr que le jour où on s’est retrouvés seuls sans enfants au milieu des amis qui en avaient tous 2 ou 3, certains déjà en primaire, ça nous piquait un peu… beaucoup même…

Mais à coup de « il n’y a pas de raison que ça ne marche pas, attendez un peu, ça va venir » de la part du premier, du second, du troisième gynéco, finalement les années défilent. Et un jour on se retrouve plus très jeunes, à mille lieues de la vie qu’on avait imaginée.

Quand j’avais 18 ans, je me disais que 25 ans était l’âge limite pour faire un premier enfant ; finalement si la nature m’avait laissé le choix, si j’avais pu juste décider de faire un enfant quand je le voulais, j’aurais été maman à 27 ans. Et puis ma fille est née à l’aube de mes 40 ans… tout juste 2 semaines avant mon anniversaire.

Ma toute petite, ma déjà grande. Pas un jour ne passe sans que je ne m’émerveille de la voir. Toutes ces années, toutes ces piqûres… et son sourire enfin !

J’ai longtemps été réticente à l’idée ‘d’entrer en PMA’, je me laissais bercer par les paroles des médecins, confiants. Et pourtant l’idée de ne pas avoir d’enfants n’était pas seulement insupportable pour moi, elle était inconcevable. Alors j’ai fini par démarrer les piqûres ; après m’être mise à mon compte côté boulot, pour être la plus disponible possible, ne pas dépendre d’un patron. Et puis une IAC, deux IAC, trois IAC, six IAC – et rien. Une FIV, une accroche, une fausse couche – les moments les plus noirs de toute ma vie. Et puis la seconde FIV, la miraculeuse, la bonne.

Je suis de ces femmes qui ont fait un bébé à quasi 40 ans, par FIV. De celles dont on pourrait croire, vu de l’extérieur, qu’elles ont laissé filer le temps pour se consacrer à leur carrière et qu’elles n’ont pas vu le temps passer – pourtant le temps je l’ai compté, jour après jour, et ma carrière je n’en ai gardé que les apparences, pour consacrer ma vie à faire un bébé.

Je suis de ces femmes qui ont accouché moins de 9 mois après leur mariage, et que certains penseront hyper-fertile. Pourtant tant d’années se sont passées en essais et en piqûres avant ce mariage ; au cours de cette fête, avec ma promesse enfin là, au creux de mon ventre, je n’osais même pas danser.

Aujourd’hui je me sens immensément chanceuse. J’ai dû attendre de très longues années pour être mère ; je n’aurai sans doute pas la famille nombreuse dont j’ai rêvé ; j’ai dû me piquer au moins 150 fois pour que ma fille puisse nous rejoindre. Mais elle est là. Ses cousins ont jusqu’à 20 ans de plus qu’elle, les enfants de nos amis seront presque tous lycéens quand elle sera en primaire. Mais elle est là. Elle est là alors que tant d’autres attendent désespérément ce même bonheur, alors que certains, bien trop nombreux encore, n’auront malheureusement jamais cette chance.

Et pourtant l’incertitude fait toujours partie de notre vie.

Avec toutes ces années vécues au rythme des piqûres et des échographies, on pourrait croire qu’on s’habitue. Mais se replonger dans les plannings, dans les vacances imaginées puis annulées, dans la difficulté de gérer un calendrier professionnel avec un calendrier de piqûres, c’est rude parfois. Et puis on se prend à rêver… au petit frère… à la petite sœur… aux deux peut-être, soyons fous ??!

Quel monde étrange, celui dans lequel on vit : la plupart des couples décident de faire un certain nombre d’enfants, pas un de plus (sauf s’il se glisse là par ‘accident’ !), pas un de moins, choisissent même parfois la saison à laquelle ils naîtront… Nous on est sûrs d’une chose, on a déjà notre petit miracle, et oui, c’est déjà beaucoup. Mais peu importe notre volonté, nous n’avons aucune prise sur ce à quoi ressemblera notre vie de famille dans un an : aurons-nous toujours un enfant unique ? Deux enfants ? Trois peut-être ?

 

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22 commentaires pour Une vie d’infertile

  1. Bulle dit :

    Magnifique…

  2. Très beau texte. Je sais pas pourquoi mais le bouquin les 10 enfants de Mme Ming me vient en tête en lisant tes derniers mots et ce rêve. Je t’espere une inconnue de demain extremement belle ! Des bises

  3. Très touchant, les mots justes, je pense que beaucoup se reconnaîtront

  4. Titine7831 dit :

    Quel joli écrit, tellement vrai…

  5. toujours aussi bien écrit ma Kaymet ! heureuse de te revoir par ici. mille bisous

  6. Fortuna dit :

    Très joli texte ! C’est bien de témoigner comme tu le fais, il faut faire tomber les préjugés! A très bientôt ;-), grosses bises

  7. artemise dit :

    Merci Kaymet pour ta participation et ton témoignage 😍

  8. Klara dit :

    I am glad that there is google translator, so I can read you.
    It was nice reading you. I was always wondering how old you are and now I see you are almost exactly my age. Nice.
    Wishing all the best for the future to your family.

    • Kaymet dit :

      Thanks for your comment and your nice wishes Klara!
      Yes I recall that I came to the same conclusion about our respective ages when reading some of your posts. Indeed nice.
      Can’t wait till you post some more pictures of your Wolfie and you tell us about your first days with him!! I’ve always loved German shepherds.

  9. laoujevis dit :

    bonjour, je viens de tomber pas tout à fait par hasard sur votre article… je ne vais pas m’étendre sur les compliments quant au style ou à la justesse des propos, tous les commentaires précédents l’ont fait mieux que je ne saurais le faire! je me permets juste cette intrusion pour une demande d’aide (oui, je sais ce n’est peut etre pas le lieu mais à qui m’adresser d’autre?): parmi vos lecteurs et -trices, quid de ceux qui malgré toutes les démarches n’ont pas pu aboutir à ce « rêve » (projet?) d’enfant, qui n’ont pas non plus d’enfant via leur conjoint, ni fait le choix de l’adoption, bref ceux qui resteront définitivement « sans enfants »? ont ils un blog? je fais partie de cette catégorie « définitivement sans enfant », et je me sens seule avec ma peine, et sans clé pour faire avec (ou plutôt faire sans)… si vous ou quiconque pouvait m’orienter vers un blog ou un lecteur ou -trice qui aurait envie d’échanger sur ce sujet…. quoi qu’il ressorte de cette bouteille à la mer, merci pour votre attention. bien à vous.

    • Kaymet dit :

      Merci pour votre commentaire laoujevis, qui n’est en rien une intrusion! Je suis désolée de lire votre peine, j’aimerais tant qu’il puisse en être autrement, pour vous et pour toutes celles qui se retrouvent sans enfants sans l’avoir choisi.
      Je peux vous conseiller quelques blogs de filles qui ont dû se résoudre à tourner la page, ou qui sont dans ce cheminement-là: il y a notamment celui de Larmes Amères (https://leberceauvide.wordpress.com/) et celui d’Artemise (https://artemiseauratoutessaye.wordpress.com/). Il y a aussi le blog de Catherine-Emmanuelle Delisle, au Canada (http://femmesansenfant.com/). Et si l’anglais n’est pas un frein pour vous, il y a quelques blogs en anglais: celui de Life Without Baby (http://lifewithoutbaby.com/) sur lequel il y a aussi un forum d’échanges, celui de Silent Sorority (http://blog.silentsorority.com/), ou encore celui de Klara en Slovénie (http://thenext15000days.blogspot.fr/).
      J’espère que vous trouverez un peu de réconfort via ces blogs et peut-être des contacts qui permettront de bons échanges.
      Je vous souhaite de trouver le chemin vers le bonheur, quelle que soit la forme qu’il puisse prendre.

      • laoujevis dit :

        Merci pour tout ces liens et Merci pour votre empathie. Un peu de chaleur humaine, ça met toujours un peu de miel sur le coeur. 🙂

  10. julys974 dit :

    Je te découvre un peu plus grâce à cette magnifique participation à la webexpo ! Tu me touches… Ton histoire, ta façon de la mettre en mots, tes pensées, ton empathie, tes espoirs… Merci d’avoir partagé tout ça avec nous. Bisous.

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